Des
dizaines de milliers de Palestiniens, notamment des femmes et des
enfants, ont convergé vendredi le long de la barrière frontalière qui
sépare la bande de Gaza d'Israël dans le cadre de "la grande marche du
retour".
Le
face-à-face entre soldats israéliens et manifestants palestiniens
devait se poursuivre samedi à la frontière de la bande de Gaza, au
lendemain d'une journée parmi les plus meurtrières de ces dernières
années, avec 16 Palestiniens tués par des tirs israliens. Ce
mouvement de protestation doit durer six semaines pour exiger le "droit
au retour" des réfugiés palestiniens et dénoncer le strict blocus de
Gaza. Un petit nombre d'entre eux s'est approché à quelques
centaines de mètres de cette barrière ultra-sécurisée, régulièrement le
théâtre de heurts sanglants entre habitants de l'enclave et soldats.
Ces derniers ont répliqué en tirant à balles réelles et en faisant usage
de gaz lacrymogène.
Selon le ministère de la Santé dans la bande de Gaza, 16
Palestiniens ont été tués et plus de 1.400 blessés dans les
affrontements avec l'armée israélienne. Dans un discours
vendredi, le président palestinien Mahmoud Abbas a déclaré qu'il tenait
Israël pour pleinement responsable de ces morts.
Les Palestiniens ainsi que la Turquie ont dénoncé un "usage
disproportionné" de la force. La Ligue arabe, l'Egypte et la Jordanie
ont également condamné la riposte israélienne. Washington s'est
déclaré pour sa part "profondément attristé par les pertes humaines à
Gaza", selon un tweet de Heather Nauert, la porte-parole de la
diplomatie américaine, exhortant "ceux impliqués à prendre des mesures
pour faire diminuer les tensions".
Le Conseil de sécurité des Nations unies, réuni en urgence vendredi
soir, a entendu les inquiétudes quant à une escalade de la violence
mais n'est pas parvenu à s'entendre sur une déclaration commune. "Il
y a une crainte que la situation puisse se détériorer dans les
prochains jours", a mis en garde Taye-Brook Zerihoun, le secrétaire
général adjoint de l'ONU aux affaires politiques, appelant à la retenue
maximale. Les Etats-Unis et le Royaume-Uni ont exprimé des
regrets quant au calendrier de la réunion - la Pâque juive a commencé
vendredi soir - synonyme d'absence de responsables israéliens. En
fin de journée, l'armée israélienne a dit avoir frappé trois positions
du mouvement islamiste Hamas, au pouvoir dans la bande de Gaza, en
représailles à une tentative d'attaque de ses soldats par des
manifestants.
La "grande marche du retour" a lieu à l'occasion de la
"Journée de la Terre", qui marque chaque 30 mars la mort en 1976 de six
Arabes israéliens pendant des manifestations contre la confiscation de
terres par Israël. Les Arabes israéliens sont les descendants de
Palestiniens restés sur place à la création de l'Etat d'Israël en 1948.
Vendredi soir, des responsables politiques de Gaza ont appelé les
manifestants à se retirer de la zone frontalière jusqu'à samedi. De
façon quasiment inédite, la police israélienne a par ailleurs indiqué
avoir eu recours à un drone pour larguer du gaz lacrymogène sur les
manifestants. Tôt vendredi, avant le début de "la marche du
retour", un agriculteur palestinien de 27 ans a été tué par un tir à
l'arme lourde israélien près de Khan Younès, dans le sud de l'enclave. Tandis
que l'Etat d'Israël célèbrera en mai ses 70 ans, les Palestiniens
attendent toujours la création de leur Etat, qui a rarement paru plus
incertaine. Le droit au retour des réfugiés reste une
revendication palestinienne fondamentale et, pour les Israéliens, un
obstacle majeur à la paix.
Le statut de Jérusalem est également un important point de
crispation, encore plus depuis que le président américain Donald Trump a
décidé de reconnaître la ville en tant que capitale d'Israël et d'y
transférer l'ambassade des Etats-Unis. Des manifestations,
moins imposantes que celles de Gaza, ont par ailleurs eu lieu en
Cisjordanie, un territoire palestinien occupé par Israël depuis plus de
50 ans.
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