vendredi 12 avril 2024

Armement : Emmanuel Macron à Bergerac en « mode économie de guerre »

Emmanuel Macron est arrivé, ce jeudi 11 avril, en Dordogne pour joindre les actes à la parole sur le thème du « réarmement ». En visite pour poser la première pierre d’une usine, le chef de l’État entend parfaire son discours enjoignant les industriels de l’armement à passer au « mode économie de guerre », après avoir multiplié les déclarations bellicistes depuis le début de l’année.

Non content de ses déclarations sur un possible envoi de troupes de l’Otan pour prêter main-forte à l’Ukraine qui ont suscité un tollé, Emmanuel Macron n’a pas fini de montrer les muscles. Il est arrivé, ce jeudi 11 avril, en Dordogne pour joindre les actes à la parole sur le thème du « réarmement » qu’il appelle de ses vœux. Le président de la République doit ainsi se rendre, aux côtés des ministres de l’Économie Bruno Le Maire et des Armées Sébastien Lecornu, à Bergerac pour poser la première pierre d’une usine d’Eurenco, leader européen des poudres et explosifs. Il doit aussi rencontrer les dirigeants de l’industrie française de l’armement, a indiqué l’Élysée sans autres précisions.

Emmanuel Macron, arguant de la nécessité de soutenir l’Ukraine alors que les financements américains sont bloqués au Congrès, exhorte depuis des semaines ces industriels de défense à accélérer le passage au « mode économie de guerre », c’est-à-dire à produire « plus et plus vite ». Lors de ses vœux aux Armées en janvier à Cherbourg (Manche), le chef de l’État avait déjà fustigé une « forme d’engourdissement satisfait » de l’industrie de défense avant l’invasion de l’Ukraine. « On ne peut laisser la Russie penser qu’elle peut gagner (…) Une victoire russe, c’est la fin de la sécurité européenne », avait-il alors martelé.

Une course à l’armement à l’échelle de l’Europe

Pour sa visite en Dordogne, Sébastien Lecornu a d’ailleurs préparé le terrain en se rendant le 26 mars à Bergerac, où il a pris soin de déclarer qu’« Eurenco, c’est la méthode à employer, c’est la vitrine de ce qu’il faut faire ». Héritier de la Société nationale des poudres et explosifs (SNPE), Eurenco réintroduit sur le territoire national la production de poudre indispensable à la propulsion d’obus. Le site de Bergerac qui en produisait depuis 1915 avait été démantelé en 2007, sans tenir compte des alertes des syndicats, en particulier la CGT, sur le risque pour la souveraineté industriel sur ce terrain.

Cette démarche s’inscrit dans une course à l’armement à l’échelle du continent. En février, le chancelier allemand Olaf Scholz a ainsi lui aussi appelé à une production d’armements « à grande échelle » en Europe pour alimenter l’Ukraine en donnant le premier coup de pioche d’une usine d’obus de Rheinmetall, dont le siège social et la direction générale se trouvent à Düsseldorf. La Commission européenne, de son côté, a dévoilé, en mars, son projet de renforcement de son industrie de défense avec un budget initial de 1,5 milliard d’euros.

L’objectif affiché est que, d’ici à 2030, « 50 % des équipements » militaires soient fournis par l’industrie européenne en créant les conditions favorables à des programmes d’achats en commun. Aujourd’hui, « 68 % des achats d’armements réalisés dans l’UE au profit de l’Ukraine se font auprès de fabricants américains », a alors précisé le Commissaire européen Thierry Breton, en charge des industries de défense.

Déjà, l’Hexagone occupe la deuxième place sur le marché des armes. Entre 2014-2018 et 2019-2023, les États-Unis ont augmenté leurs transactions de 17 %, quand la France, qui n’hésite pas à livrer des technologies à cheval entre civil et militaire à Israël et à contourner l’embargo contre la Russie, a poussé l’effort jusqu’à 47 %. Selon Katarina Djokic, chercheuse au Sipri, « la France profite de l’opportunité d’une forte demande mondiale pour stimuler son industrie de l’armement par le biais des exportations ».

 

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