Le
débat public autour du projet Montagne d’or, la plus importante
exploitation aurifère à ciel ouvert jamais envisagée par la France,
démarre aujourd’hui à Saint-Laurent-du-Maroni.
Cette
fois, c’est la bonne. Après des mois de tergiversations et un premier
faux départ, le débat public portant sur le projet minier Montagne d’or
démarre concrètement aujourd’hui en Guyane. La première réunion se
tiendra à 18 heures, sous le chapiteau municipal de
Saint-Laurent-du-Maroni. On est prêt à parier qu’il fera salle comble.
Montagne d’or, pour rappel, c’est le nom donné à ce projet
d’exploitation d’or qui, depuis bientôt deux ans, nourrit la
controverse en Guyane. Adoubé en août 2015 par Emmanuel Macron, alors
ministre de l’Économie, concédé à un consortium composé d’une société
canadienne (la Colombus Gold) et d’une major russe (la Nordgold), qui
ensemble ont constitué la compagnie Montagne d’or, il se présente pour
devenir la plus importante mine aurifère à ciel ouvert jamais développée
sur le territoire français.
Inédite, sa dimension est susceptible de faire prendre un
nouveau virage économique à la Guyane, assurent ses promoteurs. Faux,
rétorquent ses opposants, selon qui la compagnie Montagne d’or cherche à
rendre la mariée plus belle qu’elle ne l’est, et minimise l’impact
environnemental qu’aura la réalisation.
Depuis 2016, un collectif, rassemblant une trentaine
d’organisations et baptisé Or de question !, réclamait l’ouverture d’un
débat public pour permettre à la population de trancher. Le maître
d’ouvrage s’y opposait, préférant se limiter à une concertation. En
septembre 2017, le Conseil national du débat public a fini par trancher
favorablement à la demande des associations. Le débat a officiellement
débuté le 7 mars 2018 et doit se poursuivre jusqu’au 7 juillet. Avec ce
petit raté au démarrage : le jour J, ni le dossier complet du maître
d’ouvrage, ni les modalités de la consultation n’étaient disponibles
pour le public. Le seul document mis en ligne par le consortium Montagne
d’or consistait en une brochure aux faux airs de réclame touristique,
vantant les atouts de son projet.
Le mal est depuis réparé et le consortium a fourni les
chiffres qui lui étaient demandés, entre autres concernant l’impact
environnemental. Prévue à la frontière de deux réserves biologiques
intégrales – celle de Lucifer et celle de Dékou-Dékou –, la mine aura
une emprise totale de 800 hectares, dont une centaine pour la fosse
d’extraction. L’aménagement d’une piste d’accès et la construction d’une
ligne électrique à haute tension affecteront 682 hectares, dont 30 % à
haute valeur écologique. Montagne d’or assure que des mesures
compensatoires pour la biodiversité sont en cours d’étude avec les
autorités locales. Les besoins en électricité de la mine devraient
représenter 10 % de la consommation électrique de la Guyane. Les
capacités de production actuelles ne permettant pas d’y répondre,
Montagne d’or envisage, pour l’heure, de faire appel à des groupes
électrogènes – fonctionnant au pétrole, donc.
La mine mobilisera 750 emplois directs durant son exploitation
Mais la compagnie tient l’essentiel de ses arguments dans
les perspectives économiques qu’elle avance. La mine mobilisera 750
emplois directs pendant sa phase d’exploitation, assure Montagne d’or,
et près de 3 000 emplois indirects. Dans une région souffrant lourdement
du chômage – 23 % des Guyanais sont sans emploi et même 50 % à
Saint-Laurent-du-Maroni, ville proche du projet –, l’argument est
évidemment massue. Il masque cependant d’autres potentiels, dénoncent
ses opposants. Le WWF France souligne ainsi qu’il engloutirait au moins
420 millions d’euros de subventions, « soit 560 000 euros publics » par
emploi annoncé. Des sommes qui pourraient tout autant profiter à
l’agriculture,x la pêche, la foresterie ou le tourisme, relève l’ONG. Le
débat public devrait permettre de mettre toutes ces données sur la
table. Reste à savoir dans quelle mesure les dés ne sont pas déjà jetés.
Sans attendre son lancement – a fortiori ses conclusions –, la
préfecture de Guyane a octroyé, en décembre, un permis d’exploitation à
la compagnie Montagne d’or, en dépit de 7 613 avis négatifs qui avaient
été déposés.
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