"Monsieur le Premier Ministre,
Je
vous remercie de votre courrier nous invitant à désigner un
représentant du Parti communiste français dans la « commission de
surveillance » du processus de concertation sur l’avenir de l’Union
européenne, dont votre gouvernement a pris l’initiative.
Notre
parti est, par principe, très favorable à l’idée d’un débat citoyen,
libre et pluraliste, tant à l’échelle de la nation qu’à celle de l’Union
européenne, sur ce qui doit changer dans les politiques comme dans le
fonctionnement de l’UE pour sortir par le haut de la profonde crise de
confiance et de légitimité que traverse la construction européenne.
L’une
des propositions emblématiques du PCF, depuis la campagne des élections
présidentielles de 2012, est, au demeurant, dans cet esprit,
l’organisation d’ « États généraux de la refondation de l’Union
européenne ». L’expérience de démocratie citoyenne -sans équivalent à ce
jour- que fut la campagne pour le « non de gauche » au projet de traité
constitutionnel de 2005, que nous nous honorons d’avoir initiée, a
montré ce que pouvait être la créativité politique des citoyennes et des
citoyens dès lors que les moyens leur sont donnés de s’investir en
connaissance de cause dans le débat sur les enjeux européens. On ne
dira, d’ailleurs, jamais assez combien le mépris de la souveraineté
populaire qui a suivi cet authentique débat démocratique à l’échelle de
toute une société a miné la crédibilité des dirigeants politiques
français et européens, en matière de « consultation » des citoyens !
C’est
dans ce contexte que nous avons étudié votre proposition. Or, nous
constatons que la démarche proposée comme le questionnaire envisagé sont
doublement sujets à caution. D’abord, l’alternative « plus d’Europe -
moins d’Europe », à laquelle vous vous référez, nous paraît biaisée, la
vraie question étant, à nos yeux : « Quelle Europe ? » Ensuite, le
libellé des questions suggéré -et leur ordre- ne sont pas anodins :
commençant par le thème de la lutte contre le terrorisme, jugé
consensuel, la liste proposée relègue à l’arrière-plan les enjeux
sociaux, tout en les détachant des politiques économiques dont ils sont
pourtant indissociables, et les laissent dans le flou.
La
« convergence sociale et fiscale » n’a, en effet, d’intérêt que si elle
est orientée vers le haut ! Quant à la question, si sensible, des
services publics, elle est purement et simplement évacuée.
J’ajoute
que la commission à laquelle vous nous proposez de nous associer est
chargée de la seule « surveillance » du processus, non à l’élaboration
de celui-ci. Oserais-je enfin rappeler que l’expérience des «
consultations » menées par votre gouvernement en France-même, qui ne
laisse guère de marge d’initiative aux consultés, tout comme les
nouvelles règles -particulièrement inéquitables- que votre gouvernement
vient d’édicter concernant l’expression des différentes formations
politiques dans les media durant la campagne des prochaines élections
européennes, ne sont pas de nature à lever nos préventions au sujet du
déroulement effectif de votre projet de « consultations » européennes.
Dans
ces conditions, nous sommes malheureusement au regret de devoir
décliner votre invitation à nous joindre à ladite commission.
Je vous prie d’agréer, Monsieur le Premier Ministre, l’expression de ma considération distinguée.
Pierre Laurent"
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