Par
Ingrédient essentiel du Doliprane et de l’Efferalgan, le paracétamol est
désormais importé à 100 % d’Asie, de Chine notamment. Plusieurs acteurs
de la santé s’inquiètent du manque de contrôle exercé sur ces lointains
sites de production. Pointant la baisse de qualité de cet antidouleur,
ils soulignent qu’aucun recours ne serait possible en cas de malfaçon du
fait de la complexité de la filière.
Vendu sous forme de sirop, de comprimés ou de poudre à diluer, le
paracétamol est l’un des antidouleurs les plus vendus au monde. 115 000
tonnes sont consommées chaque année, dont 30 % en Europe. Au départ
fabriqué en France, puis ailleurs sur le Vieux Continent, le principe
actif est aujourd’hui importé à 100 %. D’Asie principalement. La
captation de ce marché par la Chine et l’Inde s’inscrit dans la
modification radicale des conditions de fabrication des médicaments de
ces vingt dernières années.
« D’une fabrication quasi locale de l’ensemble des ingrédients
entrant dans la composition des médicaments (principes actifs,
excipients) ainsi que des médicaments eux-mêmes, avec un petit nombre
d’acteurs bien identifiés et connus des autorités de santé, nous sommes
passés à une dispersion planétaire et à une dissémination des chaînes de
production et de distribution », résumait l’Académie de pharmacie en juin 2011 dans un document synthèse de journées de travail consacrées à la mondialisation des matières premières pharmaceutiques.
Poils de balai et insectes dans les médicaments ?
« Aujourd’hui, 80 % des principes actifs utilisés sur le Vieux Continent viennent de l’étranger. D’Inde et de Chine, surtout »,
rappelle Susanne Keitel, docteur en pharmacie, directrice de la
Direction européenne de la qualité du médicament et soins de santé du
Conseil de l’Europe (DEQM).
Pour nombre de médicaments, dont le paracétamol, seules les phases
finales de réalisation (conditionnement en comprimés, en gélules, etc.)
se déroulent désormais en France.
En 2008, la fermeture de la dernière unité de production européenne de paracétamol, détenue par Rhodia [1],
à Roussillon dans l’Isère, est justifiée par le manque de rentabilité
de l’atelier. Le groupe affirme ne pouvoir lutter contre la concurrence
asiatique, capable de répondre à la demande mondiale à un prix deux fois
plus bas, coûts de transport et logistique compris. À l’époque, la CGT, qui conteste cette absence de rentabilité, et s’inquiète pour l’avenir des quelque 40 salariés du site, met aussi en avant « la question de santé publique » que pose cette externalisation totale de la production de paracétamol.
« Les salariés de Sanofi-Aventis (l’un des clients de Rhodia,
ndlr) nous ont confirmé que le paracétamol chinois est de moins bonne
qualité », affirme alors la CGT. Des sous-produits dont on ne
connaît pas les effets sur la santé, une granulométrie qui complique la
fabrication pour les produits en cachets, en gélules ou en pâte, « dont l’aspect est loin d’être de la qualité obtenue avec le produit de Roussillon ». Le syndicat évoque ainsi des lots chinois contenant « des salissures indignes avec la fabrication de spécialités pharmaceutiques, poils de balai, insectes et autres ».
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