Laïcité, fin de vie, mariage des homosexuels, religion… Le candidat du Front de gauche détaille son engagement au magazine La Vie.
Tassé sur la banquette d’un bistrot parisien, Jean-Luc Mélenchon
arbore une mine grave. Le 14 février, au matin de l’interview, un homme
est mort de froid sur l’esplanade des Invalides. « À deux pas d’un grand
restaurant, de l’Assemblée nationale, vous vous rendez compte ? »
Silence. « Comment la société a-t-elle rendu cela possible ? »,
s’interroge le candidat du Front de gauche. Lui se veut le tenant d’une
gauche « historique, radicale, anticapitaliste ». Depuis janvier, ses
meetings font le plein. Est-il qualifié de populiste par ses détracteurs
? Il ne récuse pas le terme, au contraire. Celui qui reconnaît un «
goût immodéré pour la dispute talmudique » justifie des positions
parfois très éloignées de celles des chrétiens.
Pourquoi avez-vous accepté de parler à La Vie, hebdomadaire chrétien d’actualité ?
J’éprouve une jubilation à discuter avec des gens qui ont la foi. Ils se
situent dans un espace comparable au mien, dans un domaine plus grand
que soi. Nous partons de la même idée : aucun d’entre nous ne peut être
heureux dans un océan de malheur. Nous sommes responsables du sort des
autres. J’ai plus de facilité à parler avec des chrétiens qu’avec des
traders ! Eux sont à l’opposé de mon monde qui est fait de
responsabilité morale, individuelle et collective.
Les catholiques ? Je les connais comme ma poche. Je lis les encycliques, moi, et je dois être le seul à gauche à le faire !
Votre mère était catholique.
Oui, elle chantait divinement à l’église. Quant à moi, j’étais enfant de
chœur. Je disais la messe en latin. Puis, l’Église a excommunié ma mère
quand mes parents ont divorcé en 1960. J’ai ressenti une violence
incompréhensible pour un garçon de 9 ou 10 ans à l’époque. Ma relation
au christianisme est informée, je sais faire la différence entre les
Évangiles, entre la chrétienté latino-américaine et européenne. Il n’y a
pas de haine. Je suis un adversaire de l’Église en tant qu’acteur
politique, du cléricalisme, pas de la foi. La foi est une affaire
strictement personnelle. Elle n’a pas à intervenir dans le domaine
public. Nous avons un intérêt général humain. Le vote est une manière de
trancher. Chacun, quant à soi, peut interpréter l’intérêt général du
point de vue de ce qu’il pense bon pour tous, à la lumière de la foi par
exemple. Mais face aux autres êtres humains, dans une démocratie, il
doit présenter des arguments échangeables, contestables. Il ne peut pas
dire : « C’est comme ça, car c’est écrit dans la loi de Dieu ou du
marché. » Notez que j’étends la laïcité à l’obscurantisme mercantile.
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