Les
députés du groupe de la Gauche démocrate et républicaine ont proposé
des mesures « vertueuses » selon la majorité, qui les a pourtant
rejetées. Michel Baucher/Panoramic
Le
député PCF Fabien Roussel a défendu hier une nouvelle proposition
contre la fraude fiscale. Elle a été rejetée en commission, tout comme
l’ensemble des textes présentés par les élus GDR dans le cadre de leur
niche parlementaire.
Il
est possible d’ouvrir un compte bancaire dans un paradis fiscal en
quelques clics. Fabien Roussel l’a rappelé hier en commission des
Finances, en diffusant une vidéo promotionnelle de la société
SFM-Offshore, autoproclamée « leader mondial » dans son domaine. Le
député PCF présentait une proposition de loi afin de renforcer la liste
noire française des paradis fiscaux, qui ne compte que sept États…
« Déterminés » à lutter contre le « fléau » de la fraude fiscale, dont
le coût est estimé chaque année à 1 000 milliards d’euros en Europe,
dont 80 milliards en France, les députés LREM membres de la commission
ont finalement rejeté ce texte. « Je voulais vous remercier pour cette
proposition de loi. Quel que soit le sort qui lui sera réservé, il y a
une nécessité absolue que son esprit puisse être inscrit dans le droit
français », a mesuré Joël Giraud pour la majorité. Oui, mais pas tout de
suite. Idem pour Romain Grau, du même groupe : « Il est nécessaire que
nous nous montrions intraitables sur le sujet. Nous sommes donc
pleinement d’accord sur l’objectif et le principe de cette liste. » Mais
cette loi arrive trop tôt, ou trop fort, ou pas du bon côté de
l’Hémicycle pour En marche ! « Elle ne propose pourtant que de retenir
les critères d’établissement des paradis fiscaux qui sont déjà ceux de
l’Union européenne, en les traduisant dans le droit français, et en
excluant tous petits arrangements et toute liste grise. Nous proposons
aussi de réévaluer la liste tous les ans devant le Parlement. Cela
devrait faire consensus ! » regrette Fabien Roussel.
« Je doute de la volonté politique réelle de la majorité »
La majorité, parfois embêtée, a plaidé que les critères en
question amèneraient à inscrire des pays membres de l’Union européenne
sur la liste noire française, et craint une limitation de l’activité des
banques françaises dans les pays listés, contraire à la « liberté
d’entreprendre ». Surtout, conformément à une méthode éculée, les
députés LREM ont renvoyé la question aux conclusions de la mission
parlementaire en cours sur le verrou de Bercy, de celle dédiée à
l’évitement fiscal qui démarre aujourd’hui, et au « plan d’action du
gouvernement contre la fraude fiscale », qui doit être présenté avant
l’été. « Je doute de la volonté politique réelle de la majorité. Un
signal très fort aurait pu être envoyé en commission, observe Fabien
Roussel. Mais je ne désarme pas. Le combat avance. Cette proposition
arrivera le 8 mars dans l’Hémicycle et pourra toujours être adoptée.
Celle qu’Alain Bocquet avait fait voter en 2017 sur une COP fiscale a
d’ailleurs été reprise dans une résolution du Parlement européen mardi.
Les députés LREM freinent souvent de façon politicienne quand cela ne
vient pas de chez eux. Toutes nos propositions ont d’ailleurs été
repoussées, comme l’avaient été celles de la France insoumise. »
De fait, les cinq projets de loi présentés entre hier et
mardi par les communistes dans le cadre de leur niche parlementaire ont
été rejetés en commissions. Souvent avec les mêmes arguments. La
gratuité des transports scolaires ? Pas finançable en l’état, et puis la
loi « mobilité » doit bientôt arriver. Le projet de lutte contre les
marchands de sommeil ? Contient des mesures « vertueuses », mais mieux
vaut en reparler dans le cadre de la loi Elan sur le logement. La
reconnaissance sociale des aidants familiaux ? Les fonds manquent, et
une réforme des retraites est en préparation… Quant aux pistes de lutte
contre la précarité professionnelle des femmes, elles sont
intéressantes, mais ne distinguent pas assez temps partiel « subi » et
temps partiel « choisi », en plus de faire planer un risque
d’augmentation du « coût du travail ».
« Tout cela est révoltant. On nous dit qu’il y a de vrais
sujets, et ils sont bloqués, constate le député PCF Pierre Dharréville.
Mais on ne se résigne pas. On va continuer à pousser jusqu’au 8 mars.
Des députés de tous bords, dont des élus LREM, ont voté nos propositions
en commission, et d’autres sont encore à convaincre. Nos mesures sont
très précises, très concrètes et peuvent être adoptées de suite. Si elle
ne bouge pas, la majorité devra assumer devant le pays de ne pas
vouloir agir sur des sujets essentiels. »
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