Après plusieurs jours de négociations, la CGT Cheminots et Sud rails maintiennent leur préavis de grève et appellent les contrôleurs à se mobiliser entre le 16 et le 18 février. Sécurité à bord des trains, rémunérations et fins de carrières font partie des contentieux avec la direction de la SNCF, selon Thierry Nier (CGT).
Cette fois, les syndicats ont pris les devants. Débordés par une grève sectorielle des Agents du service commercial trains (ASCT, contrôleurs) durant la période des fêtes de fin d’année en 2022, la CGT Cheminots et Sud rails appellent les contrôleurs à se mobiliser du 16 au 18 février. La cause ? le non-respect de certains accords obtenus lors de la sortie de crise, après plusieurs tables rondes ces sept derniers jours. Entretien avec Thierry Nier, secrétaire général de la fédération CGT des Cheminots.
Pour quelles raisons estimez-vous que l’accord de sortie de crise, lors de la mobilisation catégorielle à Noël 2022, n’est pas respecté ?
Thierry Nier
CGT-Cheminots
Plusieurs points de cet accord n’ont pas abouti. À commencer par l’engagement pris d’avoir deux Agents du service commercial trains (ASCT, contrôleurs, NDLR) à bord des TGV. C’est une revendication de longue date de la CGT, dans un contexte de recrudescence des incivilités et agressions à bord des trains.
Deux agents pour assurer le bon voyage, l’information, l’accueil, la sécurité de circulation de 600 usagers, ce n’est pas de trop. Cette mesure n’est valable que dans 87 % des TGV. L’objectif de 100 % est remis à 2025, contre 2023 initialement. Nous le déplorons. Les conditions de travail à bord des TGV se dégradent et les ASCT sont en attente.
Le second point d’achoppement est celui des primes de travail. Ces dernières sont des éléments de rémunération qui reconnaissent les compétences et contraintes liées au travail en fonction des métiers. Dans le salaire des cheminots, elles s’ajoutent au traitement et à l’indemnité de résidence.
Depuis trois ans, la CGT propose un projet complet de revalorisation des primes de travail de l’ensemble des cheminots, dont les ASCT. En fusionnant des éléments de rémunérations, notamment des primes, nous pouvons passer de 590 à 780 euros brut. Ce projet est resté lettre morte auprès de l’entreprise. Cette attente provoque des crispations auprès des contrôleurs.
Qu’en est-il des fins de carrière ?
La renégociation de la cessation progressive d’activité devait avoir lieu en 2023. Ce dispositif n’a pas été revu depuis 2008. Nous réclamons d’urgence une table ronde pour l’ensemble des cheminots. Contrôleur est un métier à pénibilités avérées. Dans une carrière de 35 ans, un ASCT est hors de chez lui pour une durée d’environ cinq années, sans compter le travail de nuit. Un ASCT reste à bord du train, même si ce dernier a du retard ou un problème. Pour contrecarrer les effets de la réforme, nous voulons pousser l’ouverture de ce droit à 48 mois avant le départ en retraite.
Où en sont les 8 400 embauches promises par la SNCF ?
En dehors des promesses faites, la CGT a lancé 107 luttes locales pour concrétiser ces embauches. Le bilan mi-parcours se fera avant l’été. Nous apprécions positivement ces annonces. C’est un niveau de recrutement jamais vu depuis 2010.
Le groupe a réalisé 2,3 milliards de bénéfices en 2022. Cette trajectoire devrait se poursuivre en 2023.
Thierry Nier (CGT Cheminots)
Cela étant, en plus des 8 400 recrutements programmés, la CGT évalue les besoins dans l’ensemble des entreprises de la SNCF à 7 400 supplémentaires. Le compte n’y est donc pas. Concernant les ASCT, 650 recrutements ont été réalisés. Mais la direction n’a pas anticipé la durée de formation. Elle ne peut donc pas concrétiser l’engagement d’avoir la présence de deux contrôleurs à bord des TGV.
Le président de la SNCF, Jean-Pierre Farandou, a annoncé le versement d’une prime de 400 euros en mars, qui s’ajoute à celle du même montant en décembre dernier. Les cheminots recevront un intéressement lié à la bonne santé de l’entreprise de 1 200 euros en mai. Est-ce satisfaisant ?
Pour la CGT, l’ensemble de ces sommes doivent être versées en augmentations générales de salaires, bruts, et cotisés, ou bien dans une réévaluation des primes de travail. L’intéressement de 1 200 euros résulte de l’excédent brut d’exploitation, à savoir la différence entre les recettes et les dépenses. Or dans cette différence figure la masse salariale.
De fait, cette logique de rémunération conduit à devoir baisser les emplois, la masse salariale, pour toucher des intéressements. Le groupe a réalisé 2,3 milliards de bénéfices en 2022. Cette trajectoire devrait se poursuivre en 2023. Mais les cheminots doivent pouvoir payer leurs loyers et leurs courses quotidiennement et non au gré des bons ou mauvais résultats de la SNCF.
Jean-Pierre Farandou vous appelle à « bien réfléchir » sur les conséquences de ce mouvement durant ces congés de février. À quoi faut-il s’attendre ?
Chez les ASCT, ce mouvement va être suivi : 70 à 90 % de la profession seront grévistes. Cela démontre d’un haut niveau de mécontentement. Cette colère est vraie chez les contrôleurs mais aussi auprès des autres métiers. Les agents du matériel et de la conduite doivent être solidaires de ce mouvement : fabriquer un train nécessite une singerie entre les métiers.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire