lundi 26 février 2024

Les européennes déclenchent une crise à Génération.s


 Les dirigeants du mouvement fondé par Benoît Hamon se déchirent sur les alliances à nouer pour le scrutin de juin. La querelle éclate au grand jour à la suite d’un vote des militants contesté, et la suspension des deux coordinateurs du parti, Léa Filoche et Arash Saeidi.

À l’approche des élections européennes, le mouvement Génération.s, fondé par Benoît Hamon, se déchire au sommet. Jeudi 22 février au soir, les deux coordinateurs du petit parti dont les députés siègent avec les écologistes à l’Assemblée nationale ont annoncé le résultat d’un vote des militants en faveur d’une alliance avec la France insoumise aux élections européennes. Aussitôt, un communiqué signé du bureau exécutif de Génération.s a annoncé la suspension des deux dirigeants, Arash Saeidi et Léa Filoche, et indiqué qu’aucunes de leurs communications n’engageaient le mouvement…

Deux jours plus tard, la situation n’est pas encore clarifiée. La députée Sophie Taillé-Polian confirme la position du bureau exécutif à l’Humanité : « c’est un conflit interne né d’une décision frauduleuse des coordinateurs ». À savoir, l’organisation même du vote qui n’aurait pas selon elle respecté la procédure statutaire, et dont l’intitulé de la question serait « biaisé »« L’instance délibérative (le parlement de Génération.s) a annulé le scrutin et le bureau exécutif suspendu les coordinateurs. Comme ils avaient changé les codes, on n’a pas réussi à l’arrêter ».

59 % des adhérents pour une alliance avec la FI, selon un vote contesté

Selon Arash Saeidi, l’un des deux dirigeants suspendus du mouvement, « 59 % des 450 votants » ont opté pour rejoindre la liste conduite par Manon Aubry, et les 6e et 13e place leur seraient réservées. Il réfute toute irrégularité du processus de vote. « Apparemment des gens chez nous ne voulaient pas trop prendre le risque d’interroger des militants », tacle-t-il. « Notre responsabilité de coordinateurs c’était de redonner la parole à nos militants. On ne concevait pas que le débat puisse leur être confisqué ». Il concède que les avis au sein du mouvement était très partagés sur les choix d’alliance. Et se dit lui-même « surpris » par le résultat du vote, largement en faveur de l’alliance avec la France insoumise. Sophie Taillé-Polian, à l’inverse, ne lui reconnaît aucune légitimité. « Personne n’a participé à cette mascarade », accuse la députée Génération.s. « Et je n’ai aucune garantie sur le corps électoral. Les résultats je ne les considère même pas. Tous les militants que je connais n’ont pas voté ».

La nouvelle direction du mouvement annonce donc une nouvelle délibération de son parlement, qui sera ensuite suivie d’un nouveau vote des adhérents. Le résultat sera-t-il différent ? Pour Arash Saeidi, le verdict du 22 février semble définitif. « J’ai envie de suivre l’avis largement majoritaire de nos adhérents », explique ainsi le coordinateur suspendu de Génération.s, qui pourrait donc rejoindre la liste conduite par Manon Aubry. « Qu’ils le reconnaissent ou pas, le résultat est là », renvoie-t-il à ses camarades de Génération.s.

Sophie Taillé-Polian appelle les insoumis à ne pas faire « d’ingérences »

Cet épisode est d’ailleurs conforme à la stratégie de la France insoumise pour les européennes, depuis l’éclatement de la Nupes et la fin de non-recevoir des autres partis à la proposition du mouvement de Jean-Luc Mélenchon de faire liste commune. Manon Aubry a lancé à plusieurs reprises des appels aux « orphelins de la Nupes » à rejoindre la liste qu’elle conduit. Les arguments d’Arash Saeidi semblent en phase avec la députée européenne. « La liste conduite par Manon Aubry est la seule qui se revendique du programme et de la dynamique de la NUPES. Il y a donc une cohérence sur le fond et sur la stratégie », ajoute l’ex coordinateur, qui rappelle que Génération.s aurait « bien aimé un groupe unique de la Nupes à l’Assemblée nationale ». Cette pression en faveur d’une « union par le bas » lancée par les insoumis amène d’ailleurs Sophie Taillé-Polian à interpeller la France insoumise. « Je les appelle à être responsable, à ne pas faire d’ingérence dans les processus des autres organisations, et à attendre qu’ils arrivent à leur terme », averti la députée, qui indique également une « préférence » personnelle dans ce débat. Elle plaide ainsi pour que son parti ne participe à aucune liste, et fasse campagne en faveur d’une mobilisation des électeurs de gauche pour la liste de leur choix…

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