Fin des heures supplémentaires, non-remplacement des arrêts maladie ou grossesse : comment l’hôpital pressure son personnel
Nous venons d’apprendre dans mon hôpital que, face aux difficultés financières rencontrées avec un déficit pour l’ensemble de l’AP-HP de 400 millions d’euros, les heures supplémentaires ne seront plus payées et ne pourront être que récupérées, qu’aucun remplacement des arrêts pour maladie ou pour grossesse ne sera plus possible, et que le recours à l’intérim sera limité.
À l’énoncé de ces mesures par leur cadre, deux infirmières du service d’urgence ont annoncé qu’elles allaient démissionner. Cette réaction est compréhensible et prévisible dans un contexte de manque de personnel et de planning à trous obligeant les soignants à travailler déjà en permanence en sous-effectif.
La fatigue accumulée, mais surtout le constat de ne pouvoir apporter aux patients des soins de qualité et une disponibilité suffisante sont devenus insupportables. L’absence de perspectives d’amélioration et surtout la certitude d’une aggravation des conditions de travail conduisent de très nombreux soignants au renoncement.
En faisant ainsi fuir le personnel…
Nous sommes alors dans un cercle vicieux où les démissions, sans espoir de recrutement en nombre suffisant, rendent encore plus difficile le travail de ceux qui restent. Alors que cette situation est connue des pouvoirs publics, le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) annonce de nouvelles coupes budgétaires avec ce qu’on appelle la « technique du rabot », c’est-à-dire que, globalement, tout le monde doit se serrer la ceinture.
Mais, monsieur Barnier, sachez que cela n’est plus possible, l’hôpital a tellement maigri ces dernières années que son pronostic vital est engagé. Nous avons besoin en urgence d’une perfusion d’argent frais pour former et embaucher du personnel. Votre politique est éminemment perverse car, en faisant ainsi fuir le personnel, vous pensez pouvoir dégager votre responsabilité en expliquant benoîtement que vous voudriez bien embaucher du personnel, mais que vous n’en trouvez pas. Comment s’en étonner quand, après trois années d’études et pour exercer un métier difficile avec des horaires décalés, le salaire d’embauche d’un·e infirmier·e ne représente que 1,2 fois le Smic. Et la situation est pire pour les aides-soignant·es.
Le pronostic vital de l’hôpital est engagé.
Il n’est plus possible de voir se succéder les gouvernements dont les principaux responsables réservent leur première visite à l’hôpital pour nous faire de la câlinothérapie. Nous n’avons pas besoin de paroles, mais de moyens et de réformes qui mettent en place un système de santé assis sur le service public, excluant le privé lucratif, et une Sécurité sociale intégrale, collecteur unique de cotisations et payeur unique de prestations.
La majorité de la population est en accord avec ces propositions. Votre gouvernement minoritaire, monsieur Barnier, n’a aucune légitimité. Pour sauver notre système de protection sociale, la première étape est la censure et un vrai débat démocratique sur les choix politiques pour notre modèle de société.
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