C’est une journée inhabituelle qui s’est tenue samedi 9 décembre, au siège du PCF, place Colonel-Fabien. Les femmes responsables de plusieurs fédérations départementales et des élues se sont réunies pour plancher sur la place des femmes dans l’organisation du parti. Une démarche qui s’inscrit dans la trajectoire du congrès de Marseille, où les communistes ont adopté dans leurs statuts la nécessité de renforcer la féminisation des instances dirigeantes. Un sujet qui figure désormais parmi les priorités de la formation, comme l’a rappelé Fabien Roussel dans son discours de clôture des travaux. « C’est le lancement de grands chantiers à ouvrir pour être un parti toujours plus féministe ”, a lancé le secrétaire national du PCF, reconnaissant qu’il reste des « progrès à faire » pour atteindre la parité partout.
À quand une femme communiste sur le devant de la scène ?
C’est dans cette perspective que s’est déroulée, sous la coupole blanche, la première « Assemblée des femmes ». Une journée historique qui a rassemblé plus d’une centaine de femmes et quelques hommes, organisée autour de prises de paroles et d’ateliers non mixtes. Éliane Assassi, ancienne présidente du groupe CRCE au Sénat, s’est exprimée en vidéo sur ces enjeux féministes : « Comme dans la société, des préjugés dans notre parti ont encore la dent dure, même si les choses ont évolué positivement grâce aux travaux de la commission Droits des femmes et aux différents combats des dernières décennies. Au sein de notre parti, pendant un temps, la parole d’un camarade valait plus que la parole d’une camarade, ce n’est plus le cas aujourd’hui. » Elle note cependant : « C’est très bien d’avoir des responsabilités au sein du PCF, mais ce serait bien de mettre en avant une femme communiste. Or, depuis Marie-George Buffet, on ne peut pas dire que les femmes communistes crèvent l’écran. Je le dis avec conviction : toutes ces femmes sont en capacité de porter la voix de notre parti sur les plateaux de télévision. Sans remettre en cause la présence de notre secrétaire national, ni celle de la tête de liste aux européennes [Léon Deffontaines], ce serait judicieux d’aborder cette question. Sinon, on risque d’invisibiliser les femmes communistes, notamment les jeunes femmes. »
Un machisme persistant
Le renforcement de la présence de femmes est donc considéré comme une nécessité, voire un gage d’engagement dans la vie politique, de renouvellement et d’ouverture. « Si on veut être à l’image de la société, et je crois que nous le sommes au PCF, il faut qu’on puisse le montrer à l’extérieur, considère Maud Jan, chargée de la féminisation du parti. L’idée n’est pas de dire qu’on nomme des femmes parce que ce sont des femmes, mais qu’elles puissent accéder à des postes à responsabilité parce qu’elles ont du talent. Il existe néanmoins des freins qui les empêchent de s’épanouir en tant que militante. L’enjeu en féminisant le parti, c’est également d’attirer des profils plus jeunes. « Lors de cette journée de l’Assemblée des femmes, des ateliers étaient consacrés à ces problématiques, dont un sur la place des secrétaires de sections ou de fédérations. Sur les 13 femmes présentes autour de la table, l’écrasante majorité a témoigné de faits de sexisme ordinaire. Secrétaire fédérale des Vosges, élue à la région Grand Est, Sandra Blaise assure : « J’ai eu ce syndrome de l’imposteur parce que des camarades disaient que ce n’est pas facile pour une femme d’être en responsabilité. Quand il n’y a pas de parité, on ne se sent pas à l’aise pour diriger une fédération. Il y a toujours des vieux camarades qui pensent que le PCF n’existerait plus sans eux (rires dans la salle) et de poursuivre : « Chaque semaine, on a affaire à des comportements sexistes. Dans les petites fédérations comme la mienne, en milieu rural, c’est très compliqué, des camarades sont encore très machos, ils ne supportent pas d’être dirigés par une femme. » Un machisme diffus, très courant, qui touche tous les partis de gauche et tous les échelons du pouvoir. « Pendant les départementales 2021, je m’en suis pris plein la « gueule « par des écologistes, des socialistes, des insoumis, parce que j’étais une communiste, mais surtout parce que j’étais une femme. Je ne suis pas certaine qu’ils se seraient permis tout ça si j’avais été un homme”, s’indigne également Cécile Dhainaut de l’Isère.
Nouvelles mesures et objectifs paritaires a tous les niveaux
Comment limiter ces comportements irrespectueux ? Et garantir la parité à tous les échelons ? Les femmes communistes ont tracé des pistes : mise en place d’une parité dans les temps et prises de parole, d’un binôme femme homme au sein de toutes les instances dirigeantes, remise à plat de l’organisation de la vie du parti, notamment des réunions le soir, pour permettre aux femmes d’y assister – c’est souvent à elles que revient la charge de s’occuper des enfants. La lutte contre le patriarcat, indissociable du combat contre le capitalisme, est bien sûr au cœur de leurs préoccupations, faisant le lien avec les inégalités de genre qui régissent la société. En parallèle, la commission Droits des femmes va poursuivre les formations féministes sur le sexisme et les violences sexuelles à destination des cadres et des militants. Un système de garde d’enfant a également été mis en place. Au PCF, l’objectif est clair : d’ici au prochain congrès, la parité réelle doit être atteinte dans toutes les sections et fédérations. « C’est possible, il y a déjà une belle évolution, souligne Shirley Wirden, la responsable de la commission Droits des femmes et féminisme. Certes, il y a encore des obstacles à surmonter, mais les fédérations veulent s’améliorer à ce sujet. »
Les attentes des militantes vis-à-vis de leur organisation en matière d’exemplarité sur la parité, la lutte contre les inégalités sont d’autant plus grandes que le PCF affiche des engagements féministes très forts. Lors de sa campagne présidentielle, le candidat Fabien Roussel avait fait de la « révolution féministe » un axe prioritaire.
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