jeudi 18 juillet 2024

Duralex : « La Scop, pour nous, c’est maintenant ou jamais »


 Pour sauver Duralex en redressement judiciaire, 150 salariés de l’emblématique verrerie vont déposer, auprès du tribunal de commerce d’Orléans, une offre de reprise de l’entreprise en société coopérative. Explications avec Suliman El Moussaoui, délégué syndical CFDT.

Sauver Duralex, les salariés y croient dur comme verre. Cent cinquante d’entre eux (sur 230) se sont groupés dans un projet de société coopérative et participative pour reprendre la verrerie de La Chapelle-Saint-Mesmin (Loiret), placée en redressement judiciaire le 24 avril dernier.

L’offre de leur Scop, soutenue par les élus d’Orléans métropole qui se sont engagés à racheter le foncier et le bâti du site industriel, figurera parmi les quatre candidatures à la reprise que le tribunal de commerce d’Orléans va examiner à partir de ce vendredi 28 juin.

À l’initiative de Duralex Scop SA, le délégué syndical CFDT Suliman El Moussaoui explique comment les salariés comptent sauver « la tour Eiffel du verre ».

Votre offre est-elle la tentative de la dernière chance ?

C’est ce qu’on se dit entre nous : c’est maintenant ou jamais. Parce que si nous sommes repris par des industriels, beaucoup de salariés envisagent de démissionner. Ils ne veulent pas revivre les mêmes galères qu’on a connues ces vingt dernières années. Par contre, le choix de la Scop va les remotiver. Ce sera un nouveau challenge.

On va quand même dans l’inconnu et ça fait peur. Et comme le modèle des coopératives n’est pas assez développé en France, ils ne sont pas totalement sûrs d’eux. Ils ont quand même l’envie et sont favorables au projet. Mais ils réfléchissent à deux fois avant d’investir.

Pourquoi ne faites-vous pas confiance aux trois autres offres ?

Ces gens sont pourtant venus à plusieurs reprises. On a demandé de les rencontrer, mais ils ont refusé, ce qui nous laisse perplexes. Généralement quand quelqu’un est prêt à acheter, il veut rencontrer les élus pour expliquer son projet. Là, ce n’est pas le cas.

D’après ce qu’on sait, il y aura de la casse sociale avec les trois offres, même si on ne sait pas combien de salariés seraient concernés. Mais, justement, c’est de ça qu’on veut discuter. On n’est pas contre le fait d’être repris par un beau projet. Mais s’ils ne nous le présentent pas… C’est pour ça qu’on est à fond derrière la Scop.

Comment fonctionnera-t-elle ?

La Scop sera uniquement composée de salariés sociétaires dont on ne s’interdit pas d’augmenter le nombre si certains veulent nous rejoindre d’ici quelques mois. Ce qu’on veut à terme, c’est qu’un maximum de monde soit salarié et sociétaire de la coopérative.

Pour le moment, nous n’avons pas abordé la possibilité d’ouvrir le capital à d’autres actionnaires externes minoritaires. Un directeur général sera désigné par le conseil d’administration élu par l’assemblée générale des sociétaires.

Êtes-vous aidés ?

Oui, des intervenants de l’union régionale des Scop sont venus à maintes reprises nous expliquer le fonctionnement d’une coopérative. Nous avons aussi rencontré un ancien dirigeant d’une autre Scop, qui l’a dirigée pendant quarante ans.

Quelle implication est demandée aux salariés qui veulent y prendre part ?

Une mise de départ de 500 euros leur est demandée car, pour obtenir des financements des banques, il nous faut un capital minimal de 100 000 euros. Nous avons eu des rendez-vous avec plusieurs banques de la région pour obtenir un prêt et on compte particulièrement sur la BPI (Banque publique d’investissement).

Comment la Scop peut-elle faire la différence auprès du tribunal de commerce par rapport aux autres offres de reprise ?

D’une part, il n’y aura aucune casse sociale. On garde tous les actifs sociaux. Au niveau de la stratégie, nous connaissons nos forces et nos faiblesses, ce que nous devons faire ou ne pas faire. Et on sait quel marché attaquer et où investir.

Quand on fait l’objet d’une reprise classique, il y a toujours des tergiversations pendant un ou deux ans, avant de lancer des projets. Nous, nous sommes des salariés de Duralex. Nous savons comment organiser la suite. Enfin, nous avons la chance d’être soutenus par les élus politiques de tous bords, de la métropole d’Orléans à la région Centre-Val de Loire, en passant par les députés et sénateurs de la circonscription.

Financièrement, comment comptez-vous tenir ?

On sait que la première année sera déficitaire. La deuxième, nous atteindrons à peine l’équilibre. Et la troisième, on va commencer à générer un peu d’argent. Nous voulons atteindre 50 millions de chiffre d’affaires d’ici cinq ans. On envisage aussi une trentaine d’embauches sur les trois premières années. Et il nous faudra à un moment moderniser l’outil de travail. Mais je ne peux pas trop en parler pour l’instant, c’est assez stratégique.

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