Par BRUNO AMABLE professeur de sciences économiques
Le récent référendum organisé par Sergio Marchionne à l’usine Fiat de Mirafiori est une nouvelle étape dans la transformation néolibérale du capitalisme italien. En votant oui à une courte majorité, d’ailleurs acquise chez les cols blancs, les salariés de Fiat ont approuvé un accroissement de la «flexibilité» du travail, c’est-à-dire une dégradation des conditions de travail : un raccourcissement des pauses quotidiennes à dix minutes chacune, l’indemnisation de l’arrêt maladie, lorsqu’il suit ou précède un jour férié, seulement si le taux d’absentéisme diminue, la possibilité de réorganiser le travail en équipes sur six jours consécutifs, celle de tripler les heures supplémentaires sans négociations avec les syndicats et des sanctions en cas de grèves contre l’accord.
En cas de vote négatif, la menace de Marchionne était d’investir ailleurs qu’en Italie, en Serbie par exemple, ce qu’il fera de toute façon. Les salariés obtiennent en contrepartie une possible augmentation de la rémunération et surtout une promesse d’investissement à Mirafiori pour produire des Jeep et des Alfa Romeo. Mais rien ne dit qu’à terme il soit intéressant de produire les Jeep en Italie et Alfa Romeo pourrait être vendue, même si Marchionne prétend le contraire pour l’instant.
Le résultat de cet accord est l’affaiblissement significatif de la négociation collective et par conséquent des syndicats (celui qui a refusé de valider l’accord est de fait exclu de l’usine). Les salariés de Mirafiori seront licenciés pour être embauchés par une nouvelle société, qui n’appartiendra pas à l’organisation patronale, la Confindustria, et échappera aux conventions collectives, notamment celle de la métallurgie. Cela pourrait être le signal de départ pour d’autres grandes firmes qui voudraient, elles aussi, quitter le cadre de la négociation collective et conduirait à l’abandon de la définition des droits sociaux et professionnels au niveau national.
L’objectif affiché de Marchionne est d’augmenter la productivité des usines italiennes, qui est de fait mauvaise, notamment parce que les modèles Fiat qui se vendent le mieux sont produits à l’étranger. En vingt ans, le nombre d’automobiles fabriquées par Fiat en Italie a été divisé par trois, les investissements en RD ont été significativement inférieurs à ceux des concurrents et il n’y a pas de nouveaux modèles en prévision.
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