La révolte contre le projet d’exploitation d’une mine géante de lithium ne faiblit pas en Serbie. Elle pourrait ouvrir une véritable crise politique étant donné le rejet massif. Plus d’une cinquantaine de rassemblements ont éclaté un peu partout avec un seul mot d’ordre, « Ne damo Jadar ! » (ne donnons pas le Jadar !), depuis la mi-juillet, du nom de la vallée concernée, dans l’ouest du pays. Ce vieux projet, abandonné en 2022, a été relancé le 16 juillet par la coalition gouvernementale formée par le Parti progressiste serbe (SNS) et le Parti socialiste de Serbie (SPS). Cette décision prise par premier ministre nationaliste Miloš Vučević (SNS) fait suite à un arrêt de la Cour constitutionnelle qui avait jugé que le choix du gouvernement précédent de suspendre un permis attribué au groupe australien n’était « pas conforme à la Constitution ni à la loi ».
Deux ans auparavant, un mouvement de contestation similaire avait poussé le gouvernement à stopper le projet d’extraction de lithium dans cette même région du Jadar. La découverte en 2004, près de la ville de Loznica, de vastes gisements parmi les plus importants d’Europe avait attisé les convoitises du groupe australien Rio Tinto. Une des premières protestations a eu lieu à Požega, dans la vallée du Jadar, pour dénoncer les ravages et risques de pollution du projet.
L’Union européenne favorable au projet
Depuis sa récente victoire aux législatives, le président serbe, Aleksandar Vučić (SPS), tente d’imposer l’exploitation du gisement, qui pourrait dégager d’importants profits et créer des milliers d’emplois. Face à une contestation qui ne faiblit pas, le dirigeant répète que l’exploitation ne commencera qu’en 2026 si « les standards européens en matière de protection de l’environnement et de la santé sont garantis ». Problème, l’Union européenne est un des principaux acteurs du dossier. Bruxelles a signé avec Belgrade, le 19 juillet, un protocole d’accord qui permettrait à l’UE de se fournir en lithium exploité en Serbie.
L’Académie serbe des sciences a déjà publié une étude sur la nocivité du projet et l’impact sur la vallée agricole du Jadar, une zone densément peuplée. Interrogé par le Courrier des Balkans, Žaklina Živković, de l’association Droit à l’eau, estime que « plus d’une douzaine d’autres mines sont prévues à travers le pays, non seulement de lithium, mais aussi d’or et de cuivre… Des mines doivent également ouvrir en Bosnie-Herzégovine ».
La possibilité d’un référendum évoquée
Confrontés à l’intransigeance du pouvoir, aux arrestations et à la répression, les collectifs de militants, écologistes, agriculteurs ainsi que les organisations environnementales avaient laissé jusqu’au 10 août, soit quarante jours, au gouvernement pour adopter un moratoire. Le rassemblement à Belgrade, ce samedi, à l’initiative de la Fédération des associations écologistes de Serbie (SEOS) et du collectif Ne damo Jadar !, de plusieurs dizaines de milliers de manifestants marquait la fin de l’ultimatum et le début d’un mouvement plus large. Sur place, toutes les générations et les milieux ont scandé : « Rio Tinto, tu ne creuseras pas », « Nous ne voulons pas d’argent, nous voulons la santé », « Quand il n’y a pas de loi, il y a le peuple ». Face l’ampleur des contestations, Aleksandar Vučić a ouvert la possibilité d’un référendum, tout en les accusant d’organiser « la terreur ».
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